Introduction :
La Guyane est un département d’outre mer français d’une grande diversité culturelle dont certains groupes, comme les Bushinengués, utilisent la pharmacopée de la forêt amazonienne. Descendants des esclaves français et hollandais ayant fuit les plantations avec leur savoir ancestral, ces derniers subissent une acculturation certaine qui semble génératrice d’erreurs de reconnaissance botanique et par conséquent responsable d’épidémies d’intoxications. Des séries de cas sévères, parfois mortels, ont été observées en 2009 et 2010 suite à la consommation d’une préparation locale, la Bita, une macération amère aux vertues fortifiantes. Ces séries n’ont pas permis de définir précisément les symptômes ni d’identifier l’agent toxique qui semble être un alcaloïde aux actions antimitotiques puissantes.
Méthode :
Cette étude descriptive concerne l’investigation d’une série de 4 patients ayant consommé une Bita frelatée et pris en charge au Centre Hospitalier de l’Ouest Guyanais en 2011. Elle comporte leur description clinique et la mise en évidence de la stéréotypie de leurs symptômes ainsi que l’analyse botanique, chimique et pharmacognosique de l’agent causal.
Résultats :
Les signes cliniques sont digestifs (initialement mucite, vomissements puis constipation), cutanés (épidermite periscrotale puis alopécie et tardivement desquamation palmoplantaire et hyperpigmentation) et neurologiques (syndrome méningé, paresthésies, hypoesthésie et aréflexie puis parésie sévère). Les signes paracliniques sont à type de cytopénies (leucopénie, thrombopénie puis anémie), de cytolyse (élévation des LDH puis cytolyse hépatique) et inflammatoire (élévation précoce de la CRP). L’investigation a permis de mettre en cause de façon certaine l’arbre Stryphnodendron Polystachium, totalement inconnu de la science dont les analyses chimiques, pharmacognosiques et toxicologiques sont pour l’instant négatives.
Discussion :
Ces analyses ouvrent de nombreuses possibilités d’études quant à l’origine de la toxicité avec notamment la suspicion de la présence d’une mycotoxine alcaloïde. Ces recherches ne seront possibles qu’avec un dépistage et une prise en charge précoce des probables cas futurs. Ainsi une nouvelle définition des cas a permis de proposer des protocoles de surveillance et d’investigation à l’institut de veille sanitaire. Ces conséquences de l’acculturation prouvent la nécessité de l’aide à l’intégration des différentes cultures et de lutter contre leur assimilation.